cet après midi destination cinéma
"Nostalgie de la Lumière"
le vacarme des engrenages résonne dans la vieille coupole de l'observatoire de Santiago
on est peut-être dans les années 50 ou 60
c'est le temps d'avant
d'autres bruits retentissent dans des machines de géants, plus modernes
les écoutilles d'acier s'ouvrent vers l'infini
vers le temps sans passé
un astrophysicien parle pendant que l'espace défile
son discours n'est là que pour nous endormir
les images du désert se mélangent aux galaxies pendant que philosophe le chercheur
et l'on ne s'y attend plus du tout quand un bras surgit de la caillasse avec sa main encore charnue ouverte vers le ciel
on prend la baffe de ce reste humain parfaitement conservé par la minéralité du lieu
cela peut être un reste de chasseur précolombien ou ceux d'une victime de Pinochet
c'est le temps sans précision
en contrebas des coupoles quelques femmes marchent penchées vers l'éternité du bas: elles cherchent des os
oh pas des gros, non des fragments
des camions de l'armée, longtemps après le départ du dictateur, sont revenus nettoyer les fosses communes
cela aura été jeté à la mer sans doute, tout est propre
on ne sait pas, elles cherchent
l'astronome nous dit que le calcium des os provient des étoiles
il parle encore et l'on voit défiler les amas d'étoiles et les grandes nébuleuses
un astéroïde filmé en rase-motte avec ses deux gigantesques cratères
non, ce n'est pas un astéroïde, c'est un morceau de crâne qui dépasse du sable
Patricio Guzmán nous a encore baisé comme tout à l'heure
l'astronome invite les quelques femmes restantes à regarder dans la lunette
ça finit bien
mais le temps souvent c'est comme les vagues sur un rivage: ça s'en va et...
on ressort du petit cinéma dans les rues de Bordeaux chargées de monde
on s'ébroue
fin